TRIBUNE. En 2022, l’Afrique a été la cible d’une augmentation alarmante des cyberattaques, une donnée qui inquiète à l’approche de la Coupe d’Afrique des nations.
Avec plus de 400 millions de téléspectateurs, selon les chiffres de la Confédération africaine de football (CAF), la Coupe d’Afrique des nations (CAN) va au-delà du simple cadre d’une compétition sportive en Afrique. Cet événement majeur transcende les frontières et fédère les passionnés de football, non seulement du continent africain mais aussi du monde entier.
Cette mobilisation massive des amateurs de football, combinée à la croissance de l’utilisation des plateformes numériques pour suivre la compétition, crée une opportunité particulièrement attractive pour les cybercriminels. La CAN, par son audience internationale et sa présence en ligne, est exposée aux menaces cybernétiques, mettant ainsi en évidence l’importance cruciale de renforcer les mesures de cybersécurité pour garantir un déroulement sûr et fiable de l’événement.
La cybersécurité, une priorité pour faire de la Côte d’Ivoire un hub numérique
La Côte d’Ivoire, en tant que pays hôte de la Coupe d’Afrique des nations cette année, est pleinement consciente des défis cruciaux liés à la cybersécurité. Dans sa quête pour devenir un hub numérique régional, le pays a adopté une approche proactive. Il a élaboré une stratégie numérique et de cybersécurité pour la période 2021-2025, nécessitant un investissement massif de 2 000 milliards de francs CFA. Cette stratégie ambitieuse comprend 32 réformes et 96 projets concrets.
Les enjeux pour la Côte d’Ivoire sont doubles. D’abord, il s’agit d’assurer la sécurité numérique de l’événement sportif le plus attendu du continent : la CAN. En parallèle, le pays cherche à se positionner en exemple dans le domaine de la cybersécurité, aspirant à devenir un leader au sein de la sous-région africaine.
Des défis à relever
Cependant, le temps joue contre nous, comme l’a rappelé la récente compromission de l’ARPT en 2022, soulignant la vulnérabilité persistante de la région ouest-africaine. Si de telles failles ont pu être exploitées à une échelle moindre, les conséquences pourraient être dévastatrices lors de la CAN, un événement suivi par des millions de téléspectateurs à travers le monde.
Les infrastructures IT des sites de rassemblement et des stades à Ebimpé, Bouaké et Abidjan sont scrutées de près par des acteurs malveillants du monde entier. Les équipes, les entraîneurs et même les athlètes sont vulnérables à la perte de données sur leurs performances, à la divulgation d’informations confidentielles et à la menace potentielle sur leur avantage concurrentiel.
De plus, la menace croissante du piratage des images de la CAN et des plateformes de streaming illégales, de plus en plus sophistiquées, rend la tâche ardue pour les autorités. Ces piratages ne portent pas seulement atteinte financièrement aux fédérations et aux chaînes de diffusion, mais ternissent également l’image même de la compétition, de ses partenaires officiels et de ses hôtes.
Dans ce contexte, des mesures drastiques et immédiates sont indispensables pour renforcer la cybersécurité. La CAN 2024 ne peut pas se permettre d’être le terrain de jeu de cybercriminels sans scrupules. Il incombe à chacun de nous d’assurer que cet événement sportif majeur soit protégé contre les menaces numériques, garantissant ainsi son succès et préservant l’intégrité de la compétition pour toutes les parties prenantes impliquées.
L’État ivoirien doit mobiliser toutes les expertises en cybersécurité
Ainsi, à l’aube de la CAN, la Côte d’Ivoire se dresse en pionnière, prête à démontrer sa résilience et sa préparation exceptionnelles. Protéger notre patrimoine numérique et ainsi les sociétés civiles est non seulement un devoir, mais aussi un impératif incontournable que nous partageons tous. La passion pour le football ne doit en aucun cas éclipser cette priorité cruciale en matière de sécurité.
Toute la région ouest-africaine doit unir ses efforts pour préserver l’intégrité de la compétition et assurer son succès, tant sur le plan sportif que numérique. Il est de notre responsabilité collective de sécuriser l’avenir de la CAN, en veillant à ce qu’elle brille non seulement sur le terrain, mais aussi dans le monde numérique d’aujourd’hui.
Pour atteindre cet objectif, il est impératif de développer des partenariats public-privé solides, d’établir des systèmes robustes et des plans de réponse clairs et efficaces, tout en intensifiant nos efforts de sensibilisation.
* Franck Kié, président de l’association CIBerObs, consultant en cybersécurité et membre du club Afrique de l’École de guerre économique.
Source: www.lepoint.fr